APA versus PSD
Article ayant servi à la rédaction de celui paru (première partie) dans GérontoPratique n°1 Septembre 2001 p 6
Le
bilan de 4 ans de la loi kleenex PSD fait état de 135 000 bénéficiaires de la
PSD, soit environ 17 % des 800 000
personnes âgées de plus de 60 ans dépendantes (Insee, étude HID[1]).
De plus la PSD permettait d’importantes disparités entre départements.
Les
objectifs de l'APA sont :
- de
soutenir l'offre de services à domicile en établissant un barème national distinct pour le domicile et
l'hébergement, en respectant l’égalité sur l'ensemble du territoire
-
d'assurer la solvabilité des résidents en EHPA.
-
d’élargir l’APA au GIR 4 qui comme cela a été montré[2]
relevait d’une frontière arbitraire et qui pénalisait particulièrement les
non-voyants par rapport à l’allocation compensatrice.
-
d’étendre les aides matérielles (aides techniques et adaptation du logement) et
ou spécialisées (accueil de jour, hébergement relai ) .
- de
favoriser les prestataires, jugés garants de permanence et continuité, par le
moyen que nousq verrons ci-dessous.
-
d’assurer la qualité des services par la création d’un fond de modernisation de
l'aide à domicile avec trois objectifs : formation, recherche qualité et
professionnalisation
La
création de barèmes différents entre domicile et établissements d’hébergement
de personnes âgées (EHPA) s’appuie sur la globalisation des
prestations telles que le ménage dont le coût en établissement n’est pas
lié à dépendance mais aussi la
systématisation de l’aide en EHPA dès que la personne présente une difficulté[3].
La
prise en compte des GIR 4 par l’APA amènerait les
caisses de retraite à participer financièrement à l’APA
en lieu et place des prestations dites « extra-légales »
mais aussi à la gestion coopératrice avec les Conseils Généraux (CG) par
l’intermédiaire d’une commission mixte, où l’état apparaît également à titre
consultatif, qui permettra d’éviter de ballotter le demandeur de l’un à
l’autre.
Sur le
plan des procédures, la notion de date de dépôt de dossier complet est
maintenue bien qu’elle soit génératrice de longs retards. A contrario, la
notion de procédure d’urgence apparaît.
On
voit aussi apparaître la notion de durée déterminée pour l’APA,
alors que la PSD était attribuée sans cette condition, bien que dans les faits…
Plus
de souplesse serait aussi de mise concernant le mode
d’intervention des aidants ainsi que dans les
recours avec la mise en place d’une commission de conciliation pour
réduire les contentieux.
Voyons
plus dans le détail et article par article ce que modifié l’APA.
Elle
reprend les notions de l'art 2 de la PSD, mais en parlant de façon plus vague
de "personne âgée" versus "remplissant des conditions
d'âge". Comment cette notion va-t-elle être interprétée ? Elle garde
la définition par contre la définition de la dépendance : "nonobstant
les soins qu'elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d'une aide pour
l'accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l'état nécessite une
surveillance régulière."
A
domicile l’APA maintient la notion de prestation en
nature, donc la nécessité d'une effectivité de l'aide.
Elle
précise à juste titre la notion de la nécessaire utilisation des moyens (on
voyait trop souvent les plans d'aides amputés de la part revenant aux moyens de
la PA...) et fixe l'indexation automatique de la revalorisation à l’indice
Insee de "l'évolution des prix à la consommation hors tabac" et non
plus à un décret spécifique annuel de revalorisation de la Majoration Tierce
Personne.
La
participation des bénéficiaires est elle aussi automatiquement liée à "un
barème national revalorisé au 1er janvier de chaque année comme les pensions
aux termes de la loi de financement de la sécurité sociale"
La PSD
-pardon l'APA- sera à domicile... en établissement, si ceux-ci n'ont pas passé
de convention pluriannuelle... C’est à dire avec établissement d’un plan d’aide
etc… Moyen élégant de permettre le versement d’une
aide dans les établissements non agréés à l’aide sociale qui était souvent
refusée par les CG.
L’APA peut être directement versée aux associations
prestataires, contrairement à la PSD,... sauf refus explicite du bénéficiaire
du bénéficiaire, "dans les cas de dépendance les plus importants
déterminés par voie réglementaire". Le bénéficiaire est-il en état de
faire valoir sa volonté ? La jurisprudence déterminera si le bénéficiaire
peut être représenté par son tuteur pour percevoir l’APA
directement... Ecueil prévisible : les CG verseront-il la part aide
matérielle aux associations prestataires ? Si oui, celles-ci pourront elle
facturer des frais de gestion pour l’achat des couches ?
Certes,
cette solution présente des avantages : pas de gestion des congés payés, pas
d'indemnité de licenciement au décès du bénéficiaire, personnel -théoriquement plus- qualifié, mais elle
entraîne un surcoût horaire très important (60 à 100 %) et génère donc une
diminution des heures effectives ! Le projet ne parle pas de bénéfice de l'exonération des
cotisations patronales de sécurité sociale pour l'emploi d'une tierce personne
prévue par le décret du 9 juin 1999 !
De plus une modulation de la valorisation du plan est prévue
suivant la qualification de l'aidant ! L’épineux problème des toilettes réapparait en filigrane ! Quand autorisera-t-on les
aides soignantes à exercer en libéral ?
L’APA rigidifie
administrative les critères de suivi de l'effectivité de l'aide. Elle garde les
mêmes exclusions (conjoint, concubin) justement étendues au PACS et ajoute (à bon escient) la déclaration de
parenté aidant-aidé.
Elle
ajoute par rapport à la PSD les règles de suspension de versement pour non
effectivité de l'aide, dangerosité non seulement physique, mais aussi pour le
bien être physique ou MORAL du bénéficiaire ! L’APA
précise que la part de financement du bénéficiaire, appelée tiers payant par
certains, doit effectivement être utilisée : combien de plans d’aide sont
amputés de cette part, combien de contentieux doit-on à cela ?
Elle
se base sur un tarif par établissement, modulé par la cote part du bénéficiaire
avec la garantie d’un argent de poche minimum. La côte part sera réévaluée sur
la base des pensions et doit également garantir au "conjoint" au sens
élargi (concubin, pacsé) un minimum de ressources.
Si la personne ne peut
assurer son "ticket modérateur", c'est l'aide sociale qui l'assurera.
Ceci fait craindre le recours sur succession au 1er franc et obligation alimentaire des descendants et pourrait
constituer un net recul social vis à vis de la PSD !
Le
projet APA ne fait que remédier à certains points d’achoppement de la PSD et
n’est qu’un toilettage sans réels progrès : corps de "visiteurs" à
domicile, réelle professionnalisation de l'aide
à domicile par la reconnaissance d'un statut libéral des aides
soignantes etc...
L’APA risque elle aussi d’entraîner ou de maintenir son
cortège de dysfonctionnement : dossier complet, passage à la règle de
l’aide sociale en établissement, persistance d’AGGIR…
[1] C COLIN & V COUTTON (2000) « Le nombre de personnes âgées dépendantes d’après l’enquête HID », Etudes et résultats, n°94,décembre. http://www.sante.gouv.fr/drees/etude-resultat/er-pdf/er094.pdf
[2] F BEVERNAGE(1998) « La grille AGGIR : un enfer pavé de bonnes intentions ? », La revue du généraliste et de la gérontologie, n°42, février. http://www.bevernage.com/geronto/aggir.htm
V COUTTON (2000) « Les mécanismes de la grille AGGIR », rapport de convention d’études pour le ministère de l’emploi et de la solidarité
C COLIN & V COUTTON, opus cité
[3] C COLIN & V COUTTON , opus cité